PAtober - édition octobre 2023

[maanu]

25 octobre - Ville fantôme

C’est étrangement calme, par ici…
J’ai déjà fait tout le chemin depuis chez moi jusqu’au centre-ville et c’est à peine si j’ai croisé cinq ou six passants. Ils ne m’ont pas adressé un regard, pressés qu’ils étaient de rentrer chez eux avant que la nuit soit complètement tombée.
Les luminaires fatigués ne clignotent et ne grésillent plus pour personne à part moi. Certains magasins sont fermés plus tôt que prévu, comme si les commerçants, eux aussi, avaient hâte de déserter les lieux. En levant les yeux, je vois des lueurs blafardes qui passent devant certaines fenêtres, dans les appartements plongés dans le noir.
Je m’arrête tout à coup. Est-ce qu’il se passe quelque chose dont je n’aurais pas été informée ? Une alerte ouragan ? Un couvre-feu ? Mon dieu, et si je n’avais pas le droit d’être là ? Si je me faisais arrêter par la police ?
Des cris retentissent tout à coup au loin.
Je me tourne vers eux. La clameur continue. Là-bas aussi, au-dessus du stade, des lumières éclaircissent un peu la nuit.
Suis-je-bête. C’est vrai qu’il y a match ce soir.

[Solamades]

24 :  Ville Fantôme

Nathan progressait entre les arbres quand il comprit qu’il avait trouvé quelque chose. Les hauts murs de pierre en ruine, les dalles au sol, les routes envahies par la végétation… il avait déniché une citée oubliée ! Enfin, la chance lui souriait !

C’était quand même étrange, il n’y aurait pas dû y avoir quoi que ce soit ici. Ça n’apparaissait sur aucune carte. Peut-être qu’il était le premier, peut-être que son nom allait être accolé à celui d’une découverte majeure…

Il pénétra en douceur dans le bâtiment le plus proche. Tout était calme. Il accéda à un vieil appartement encore en bon état. L’humidité avait attaqué les murs, la plupart des tissus tombaient en poussière et le bois avait été rongé, mais il restait des semblants de meubles, dont l’un, effondré, ne dissimulait plus son contenu. Un coffre ! 

Il se rapprocha, colla l’oreille contre et commença à faire jouer la molette principale. C’était tellement facile, dans ce silence végétal, d’écouter de vieux engrenages rouillés travailler. Trop simple pour lui… Il entendit le petit clic final avec satisfaction.

« Qu’est-ce que vous fabriquez chez moi ! »

Nathan sursauta. Il n’avait pourtant entendu personne approcher. Lorsqu’il se retourna et tomba nez à nez avec un homme transparent, il se sentit à deux doigts de s’évanouir.

« Fiche le camp d’ici, morveux ! »

Il paniqua et se redressa d’un bond avant de prendre la fuite. Il aurait dû bousculer l’homme en s’échappant, mais il lui sembla qu’il était plutôt passé à travers. Il ne s’arrêta pas pour vérifier, il fonça, même si son esprit était bloqué sur une idée fixe.

Comment un fantôme pouvait-il avoir aussi mauvaise haleine…

[Dédé]

25 octobre :

25. La ville fantôme
— Paëlla, tout ce que je dis, c’est que j’aimerais vivre dans une ville fantôme.
— Pourquoi, Moussaka ?
— Pour éviter les déceptions, les conflits, la violence, les dangers, les mensonges, les poisons…
— Tu dis ça par rapport à ce qui se passe avec Rizotto ?
— Si seulement il n’y avait que ça…
— Ça a pas l’air d’aller, sœurette. Tu m’inquiètes.
— La vie est décevante…
— Il y a parfois de bons côtés.
— Vraiment ?
— Oui. Regarde ! Avec Patober, on parle de créer notre propre agence de détectives. Tu veux en faire partie ?
— Moi, détective ? J’ai du mal à trouver mon ombre quand elle est devant moi, et encore moins mon reflet dans le miroir… Alors, mettre la main sur des disparus, enquêter, suspecter, attraper des coupables… Trop peu pour moi.
— Moussaka, c’est quand même la première fois que je te sens aussi mal. Je te reconnais pas… Jamais tu as parlé de ville fantôme avant.
— La ville fantôme, ce n’est peut-être pas la solution…
— Pourquoi ?
— Parce qu’il y aurait des fantômes...
— Tu as un problème avec eux ?
— Il y en a certains que je ne voudrais pas recroiser.
— Genre, qui ?
— Je ne sais pas. Des gens.
— Je remarque que tu es très secrète sur ta vie privée. Je sais même pas si tu es encore célibataire.
— Je le suis.
— Pourquoi j’ai l’impression que tu me dis pas tout ?
— Parce qu’il y a des choses que tu préférerais ne pas savoir, crois-moi.

[Herbe Rouge]

25/10/2023 : Ville fantôme

Mon taxi refusant d’aller plus loin, j’étais arrivé dans le hameau en tracteur. En putain de tracteur ! J’avais vraiment été muté dans le trou du cul du monde. Et bien sûr, il pleuvait comme vache qui pisse.
Une fois arrivé sur la scène de crime, je sautais dans la gadoue - qui m’éclaboussa bien comme il faut - et adressais un signe d’adieu et un sourire grimaçant au vieux qui avait ramené mes fesses jusqu’ici. J’en avais profité pour le questionner en chemin, mais il savait rien. Un cadavre dans cette vieille baraque ? Il n’en avait pas entendu parler.
Étrange. Ce genre de rumeur, ça courait vite pourtant.
Il y avait du rubalise devant la porte, et c’est tout. Ils étaient où mes nouveaux collègues ? À l’intérieur, une odeur immonde de fumier et… merde. J’avais posé le pied dans la merde. C’était quoi ce délire ? Que faisait une bouse de vache dans une baraque ?
Dépité, trempé et désormais puant, j’avançais dans la maison abandonnée. Mais alors que j’entrais dans le salon, je remarquais que quelque chose clochait. Le « cadavre » était en paille. Un vulgaire épouvantail étalé au sol et marqué à la craie ! J’entendis des gloussements derrière mon dos et me retournais pour découvrir mes deux collègues hilares.
Visiblement, ils pratiquaient toujours le bizutage dans la cambrousse. Journée de merde.

[TUSCARORA]

LA VILLE FANTôME

Il avait pris la route parmi des milliers de gens comme lui, chassés loin de chez eux. Au bout d’un certain temps, abandonnant la foule résignée qui marchait à pas trop lents, il avait bifurqué vers la forêt afin de se protéger du soleil harassant de midi. Déchirant le ciel, le croassement rauque et sauvage des corbeaux l’avait fait sursauter tandis qu’il tentait d’escalader un petit promontoire. De là-haut, il avait aperçu un semblant de ville. Elle ne figurait pas sur sa carte. Il lui fallait pourtant tenter le coup, boire, se réapprovisionner. En dépit de son appréhension, il avait décidé de poursuivre son chemin dans cette direction. Il n'avait trouvé qu’un puits asséché, des resserres abandonnées, des baraques sans toit. Il s'installa dans l'une d'elles pour la nuit. Il rêva d’une fontaine en pierre ornée de statues antiques projetant leur ombre dans le miroir de l'eau et qui l’appelaient. Mais il ne pouvait s’en approcher car il était prisonnier d’un cercle de feu, tourmenté par le chant du gargouillis cristallin.
Au matin, il avait été réveillé par un volet qui claquait, sinistre, dans le vent. Puis plus rien, pas un murmure. Ce silence oppressant était troublé de temps en temps par un éclair ou un bref coup de tonnerre, comme un écho de la guerre qui sévissait encore.
Et puis la pluie était tombée en abondance le faisant danser et hurler de joie. Il avait alors offert sa popote à toute l’eau du ciel dont il avait précautionneusement empli sa gourde. Une salamandre se tenait non loin de là, sur le qui-vive, dans sa robe noire luisante, tachetée de jaune, avec ses petites pattes étoilées. Dans cet univers de désolation, il y avait vu comme un espoir. Il avait rempli son sac de quelques objets et victuailles glanés par ci, par là puis il avait rejoint un groupe isolé de fugitifs.

[Raza]

25 octobre – Ville fantôme

Lorsqu’ils franchirent la porte de la ville, ils ne purent s’empêcher de ressentir la puissante mélancolie des lieux. Malgré la distance qui les séparait de ceux et celles qui avaient habité ici, que ce fût en kilomètres, en temps ou en culture, l’absence de ces inconnus leur pesait. Leur mission les avait amenés à parcourir les terres désolées des contrées de l’Est, mais ce vide leur avait toujours semblé naturel. Ces allées aux gratte-ciels sublimes, aux parcs encore verdoyants et aux fontaines rouillées créaient en creux une sensation d’horreur proportionnelle à ces beautés délaissées.
Ils savaient qu’ils ne rencontreraient personne, et pourtant, leurs réflexes de survie les maintenaient aux aguets, comme si l’origine de cet abandon pouvait prendre vie, leur sauter à la gorge et les obliger à fuir, eux aussi. En silence, d’un pas incertain, ils marchaient vers l’objet de leur quête. Quelle ironie que la solution eût été dans cette ville depuis le début. Parfois, on ne sait ce qu’on cherche que lorsqu’on l’a perdu.

[Nascana]

Jour 25

Je traverse la ville à petits pas. Le sable crisse sous mes bottines. Chacun de mes pas fait jaillir un nuage de poussière. La lumière de la lune éclaire les bâtiments abandonnés, aux façades décrépies. L’écurie est déserte, seule la poussière occupe les mangeoires. À côté, les vitres du saloon sont fendus lorsque ce n’est pas éclaté sous la puissance de la nature.
Au nord de la ville, une église se dresse encore, mais aucune cloche ne sonne plus les heures depuis longtemps. Le silence règne, troublé uniquement par le vent.
Pourtant, je le sais, je le sens. Je ne suis pas seule ici. Une autre créature se terre dans ses ruines. Nous finirons par nous rencontrer et j’ignore ce qu’il en ressortira, pourtant j’avance. Je ne peux plus laisser la peur guider ma vie.

[maanu]

26 octobre - Ce chat était-il noir ?

L’heure était grave. Un malandrin – de type félin, à en croire les empreintes incriminantes découvertes dans le jardin – avait profité du couvert de la nuit pour venir dégommer les bégonias.
Une odeur suspecte, qui emplissait le nez dès que l’on approchait de la scène de crime, laissait même présager qu’on avait commis des actes de vandalisme encore plus infâmes : un pissou avait été perpétré contre le mur de l’établi.
Les inspecteurs Malo et Hortense, malgré les directives de la commissaire Mamoune qui leur avait expressément demander de rester en-dehors de cette affaire, étaient bien décidés à faire payer le ou les coupables.
« Ahah ! » s’exclama soudain l’inspectrice en levant triomphalement un bras.
Son collègue, qui cherchait des preuves à quatre pattes entre les massifs, se releva précipitamment.
« Vous avez quelque chose ?
-Et comment ! Je viens de découvrir un poil, juste à côté du lieu du forfait.
-Tiens, tiens, tiens… Quel genre de poil ?
-Le genre poil de chat. »
L’inspecteur prit un air victorieux.
-Mais c’est très bien, ça ! Il appartient forcément à notre coupable ! Et de quelle couleur est-il ?
-Je dirais… gris. »
Il eut un geste de dépit.
« Vous êtes sûre ? Pas blanc ? Ou noir ?
-Mmh… Non, certaine. Il est gris.
-Mince !
-Pourquoi ça ?
-Mais enfin, inspectrice, réfléchissez ! La nuit, tous les chats sont gris. Mais de jour, celui qu’on cherche pourrait être de n’importe quelle couleur.
-Ah, je n’y avais pas pensé ! Bon… Tant pis, alors.
-Eh oui. »
Désappointée, elle laissa le poil tomber au sol.
« Vous être drôlement perpiscace, inspecteur.
- Je sais. Mais vous verrez : le flair, ça vient avec l’expérience. »

[Sorryf]

Jour 25: ville fantôme

Spoiler

il y a du relâchement

[Herbe Rouge]

26/10/2023 : Ce chat était-il noir ?

Non. Il était rose. Ce qui était un peu curieux. Je clignais des yeux. Toujours rose. Le chat me lécha le visage et je le repoussai d’une main molle. Je m’aperçus alors que j’étais à terre, sur le dos. Le chat revint à la charge, mais un chat rose, ça ne m’inspirait pas trop confiance.
Déjà que j’avais peur des chats noirs. Oui, je sais, superstition. N’empêche, j’étais superstitieux et n’avais pas honte de l’avouer. D’ailleurs tout à l’heure j’ai préféré marcher sur la route pour éviter de passer sous l’échelle qui bloquait le trottoir. Alors un chat rose, non, je n’avais pas confiance.
Il revint à la charge, tentant de me lécher le visage. Mais au fait ce chat, est-ce que je ne le connaissais pas ? Il était blanc habituellement non ?
- Monsieur ? Monsieur ? Vous avez repris conscience ? J’ai appelé une ambulance, ne vous inquiétez pas. Vous saignez beaucoup, mais ils m’ont dit que ce n’est pas grave, c’est juste l’arcade sourcilière. Mais vraiment monsieur ! Marcher sur la route comme ça ! En plus vous avez cassé mon rétroviseur ! Sept ans de malheur ! Mon pauvre, vous n’avez vraiment pas de chance aujourd’hui.