PAtober - édition Octobre 2022

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Raza
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Raza »

Ce ne sont pas des compétences que l'on acquiert par hasard, ni de celles qu'on apprend sur un coup de tête un weekend perdu, pourtant c'étaient celles dont il avait besoin pour réussir son projet.
Il s'était mis en tête cette idée que cette tâche préserverait son humanité, que d'une certaine manière, même s'il venait à mourir à son tour, il aurait eu une vie décente, humble mais sensée.
Il n'avait jamais été en contact avec un moine élyséen, ni une quelconque prêtresse des trois enfers. Désormais, ni l'un ni l'autre de ces fonctions n'existaient. Désormais, il ne restait plus que lui. Lui seul pouvait enterrer ses compatriotes, mais il le ferait. Les vents glacés de l'hiver millénaire conserveraient leurs corps indéfiniment.
Avant de s'occuper du premier, il devait apprendre les étapes des rites, de la mise en bière jusqu'à l'enterrement, en passant par les neuf prières et la purification. Il prendrait le temps nécessaire, mais il ne faillirait pas.

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Ewen
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Ewen »

28 octobre – Bière
C’est pas tant la bière, mais plutôt qui te l’offre et où tu la prends. J’en ai bu, des « goût produit lave-vitre » et des « parfum pisse » (les meilleures sont celles qui trouvent le juste milieu). Mais les plus savoureuses, ce sont bien celles qu’on boit après trois heures de bûcheronnage. Elle est tiède, parce que ça en fait quatre, d’heures, qu’on l’a sortie du frigo (une de plus, le temps de faire le trajet jusqu’à la futaie en tracteur). Mais elle a le goût d’or. C’est comme ça que payent les amis. Les pintes en terrasse dans la rue de la soif c’est pour les bourgeois-bohèmes et les soiffards. La bière la vraie, je me fiche de son nom. En pression ou décapsulée, tant qu’une main terreuse me la tend je sais que je l’apprécierai. Les bières c’est fait pour accueillir et remercier. C’est comme ça qu’on m’a élevé.

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Nascana
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Nascana »

Jour 15 : Sous la mer

Opale nage dans la mer. Elle est seule et profite de la chaleur du soleil sur sa peau. Ses paupières se ferment. Je la sens détendue. C’est le moment, j’en profite pour surgir derrière elle. Ma main se pose sur sa bouche pour éviter qu’elle ne pousse un cri. Je viens la plaquer contre mon torse puis déposer un baiser sur sa nuque.
Il ne faut que quelques instants pour qu’elle éclate de rire. La joie remplace la surprise sur son visage.
– Où étais-tu ?
– Sous la mer.

Jour 16 : parking à boulet

Lorsque j’arrive sur le parking devant le lycée, du bruit provenant de la droite m’agresse toujours les oreilles. C’est la bande de Célestine qui veut se faire remarquer. Moi, je me contente de déposer ma moto sans rien demander d’autres. Entendre leurs conversations vides pendant l’espace de quelques secondes me donne toujours l’impression d’être plongée dans un autre monde.
Ils crient, interpellent les élèves dont ils connaissent le nom pour montrer qu’ils existent. Au fond, ils sont bien là où ils sont, rangés dans le parking à boulets.
– Hé, Valiana !
Je ne réponds pas et continue mon chemin.
– Hé ! Je te cause !
Parfois l’envie me prend de leur dire ma façon de penser. Mais je pense à papa. Mieux vaut que je reste discrète.
– Valiana ! Vas-y, salope ! T’es bonne !
C’en est trop. Alors que je vais me retourner, une main se pose sur mon épaule.
– Léon recherche du monde pour l’aider à créer sa nouvelle à choix multiple sur Halloween. Tu en es ?
Mon regard se lève vers le visage rond du brun. Une force de la nature ainsi qu’un bon ami. D’ailleurs, je n’entends plus les voix criardes derrière moi.
– D’accord. On en est où ?
– Il dit qu’on pourra créer le boss final qu’on veut si on l’aide.
Je souris avant de suivre mon ami.

Jour 17 : Mauvais oeil

– C’est quoi ça ? demande mon père alors qu’il fixe le bracelet que j’ai posé sur la table de la cuisine.
– C’est pour toi. Un porte-bonheur qui permet de repousser le mauvais œil.
Sa main récupère le bijou que j’ai tressé avec soin.
– Je ne crois pas à ce genre de connerie !
Son intonation dur me blesse. Je fixe un point imaginaire sur la table, histoire d’oublier. De toute façon, ça ne vaut pas la peine d’en faire un drame, il ne comprendra pas.
– C’est pas grave…
Est-ce que ma voix s’est faite plus tremblante que je ne l’aurais voulu ? Ça n’a pas d’importance, il ne s’en rendra pas compte de toute façon.
Le silence se fait dans la cuisine.
– Bon… Attache-le à mon poignet !
Surprise, je tourne la tête vers mon père.
– On va dire que dans mon métier, je ne peux pas me permettre de cracher sur la chance.

Jour 18

– Est-ce que tu as des draps ?
Je fronce les sourcils. J’ai du mal à comprendre où ma mère veut en venir.
– Oui. Enfin comme tout le monde.
L’image de ma parure de lit vert d’eau avec des motifs géométriques blanc me revient en mémoire.
Un soupir dans le téléphone.
– Mais non ! Est-ce que tu as des draps de lit en trop ?
– Non ! Pourquoi j’en aurais en trop ?
Avec trois jeux de draps, j’estime en avoir suffisamment pour ma consommation personnelle.
– C’est pour l’association ! On cherche à réunir le nécessaire pour aider les jeunes migrants dans leur premier logement !
L’agacement dans la voix de ma mère est perceptible. Elle et son microcosme associatif me saoule. J’aurais bien aimé qu’elle m’appelle pour prendre des nouvelles de moi. Ça m’aurait fait plaisir.
– Et la vaisselle ?
Je lève les yeux au ciel. Elle va me faire le coup avec toute sa liste ?
– Je regarderai.
En vérité, je n’ai aucune intention de le faire. Mais j’ai soudain l’attention de ma mère.
– Si tu veux, je peux t’envoyer tous les objets qui pourraient être utiles !
C’est toujours pareil. Il faut que j’aille dans son sens pour qu’elle daigne s’intéresser à moi. D’une oreille distraite, je l’écoute. Chacun de ses mots me pique en plein cœur. Il y a tant de passion lorsqu’elle parle de son association. Cela ne laisse pas de place pour son fils.

Jour 19

De temps à autre, je jette un coup d’œil en direction de mon père qui joue à la console. Il a l’air de s’énerver. Comme ça dure depuis un moment déjà, je me risque à poser la question :
– Pourquoi tu râles ?
Il hésite.
– C’est à cause de ce jeu… Il manque des explications…
– Des explications sur quoi…
Il souffle. Je crois qu’il veut me faire comprendre que je l’agace.
– Comment faire évoluer les armes… Enfin, il faut des composants et je ne sais pas où les trouver !
– Tu as regardé dans ton bestiaire ?
D’un geste vif, il se retourne vers moi.
– Mon quoi ?
– Ton bestiaire ! Dans l’inventaire. Ton personnage prend des notes sur les créatures rencontrées, mais aussi sur ce qu’elle te laisse lorsque tu les bats.
– Pourquoi j’étais pas au courant de ça, moi ?
Je hausse les épaules. C’est lui qui joue pas moi.
– La question, c’est plutôt comment tu sais ça, toi ?

Jour 20

On frappe à la porte du camping-car. Vu la période de l’année, Cliff n’a aucun doute sur la raison. Il ouvre pour découvrir trois enfants d’une dizaine d’années.
– Un bonbon ou un sort ? murmure l’un d’eux d’une petite voix.
Cliff se contente de hocher la tête avant de se saisir d’un sachet pour déposer des caramels dans chacun des sacs. Ceci fait, il leur fait signe que c’est bon.
– Merci, monsieur.
Les gamins s’éloignent en courant.
Cliff referme la porte. Il est anxieux. C’est toujours comme ça, lorsque sa fille n’est pas là. Pourtant, il sait où elle est. D’ailleurs, il attend avec impatience que l’église sonne vingt-deux heures pour aller la rechercher.
Cette soirée d’Halloween chez une amie était importante pour elle. Malgré sa peur, il ne pouvait la priver de sortie.
Sa montre lui indique vingt-et-une heure dix. On frappe à la porte. Il récupère son sachet de gourmandise. Au moins, le temps passe plus vite comme ça.
Modifié en dernier par Nascana le 29 oct. 2022, 15:24, modifié 1 fois.

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LionneBlanche
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par LionneBlanche »

Jour 29 : nuit d'orage

Ma mère a toujours eu peur de l’orage, des éclairs lumineux et encore plus du bruit fracassant. Elle se cachait toujours quelque part sans en avoir l’air, comme si une pièce pouvait la protéger plus qu’une autre, et elle sursautait comme un chat qu’on surprend dans le dos.

Je n’ai jamais trop compris, et surtout, je n’ai jamais partagé son effroi. Bien sûr, je compatissais, j’essayais de la rassurer, comme mon père et mes frères. Mais ce qui la terrorisait m’émerveillais.

Quand l’orage tombait la nuit, je me relevais en silence et je marchais dans le noir jusqu’à la fenêtre de la cuisine ; on n’en fermait pas souvent les volets. Et là, surveillé par le regard protecteur des chiens tirés de leur sommeil par mon escapade, je grimpais sur le banc. Je pouvais rester longtemps pendue à la fenêtre à observer le spectacle, seul le froid me ramenait à mon lit.

C’est terrible, quand on y pense, que quelque chose de dangereux puisse être aussi beau. La foudre, on ne sait jamais où elle va frapper, ni quand, mais elle illumine les cieux nocturnes en un bouquet féerique que même les feux d’artifice ne savent pas imiter.

maanu
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par maanu »

29 octobre, Nuit d'orage

Le vent souffle, dehors, tout doucement.
Il caresse le vieux châtaignier,
Discute avec ses feuilles, gentiment,
Les fait rire et frissonner.

Moi, heureux, je les regarde de loin,
Et je souris, en témoin éternel
De la calme existence du jardin,
Et de cette ritournelle.

Mais voilà la fragile frondaison
Tout affolée par le vent amoureux.
Est-ce le ton, ou bien la passion
Qui monte ainsi entre eux ?

La brise, ne maîtrisant plus ses ardeurs
Envers ces pauvres buissons qui flanchent,
Emporte avec elle toutes les fleurs,
Et bientôt, même, les branches.

Elle siffle comme un tableau et sa craie.
Qui l’eût cru capable d’un boucan pareil ?
Je soupire : « Si seulement je pouvais
Me boucher les oreilles. »

Sur les ardoises agitées, tout là-haut,
Ça grince à tout va : triste girouette,
Toute déboussolée, ne sait plus trop
Où donner de la tête.

Il fait tout à fait nuit, à présent.
On n’y voit rien, sauf quand la foudre
S’abat soudain pour avertir le vent
Qu’elle est prête à en découdre.

Ses menaces ne sont pas assez claires,
Et, sous les nuages noirs rassemblés,
Tempêtant, grommelant, c’est le tonnerre
Qui vient le gronder.

Mais le vent se rit de toutes ces plaintes.
Et il hurle toujours, insaisissable.
Il souffle, avance, recule et feinte,
Éternel, infatigable.

Et moi, tandis que le vent m’emportait,
Ayant agrippé mon vieux chandail,
Je ne me rebellais pas, car tel est
Mon destin d’épouvantail.

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Sorryf
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Message par Sorryf »

PAtober 29 - nuit d'orage
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Yvaine
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Yvaine »

29 octobre - Nuit d'orage

Quand elle était enfant, elle adorait les orages. Elle passait la nuit accoudée à la fenêtre, avec un vieux livre et une tasse de chocolat chaud que lui préparait sa grand-mère. Souvent, elle stoppait sa lecture pour regarder la pluie tomber, observer un éclair ou écouter le tonnerre – comme si ce son, si fort, si tumultueux, était une musique pour elle.

Depuis, elle avait grandi. Elle ne regardait plus l’orage comme un événement magnifique et hasardeux. Désormais, elle savait que les orages adviennent lorsqu’il a fait trop chaud, que des vents chauds et froids entrent en fiction, et tous ces savoirs météorologiques que lui avait légué l’école. Les orages n’étaient pas un hasard splendide ; ils étaient la juste rétribution des choses, la terre qui retrouvait son équilibre, l’âme qui implosait pour mieux reprendre le contrôle.

Alors les orages, c’était un peu elle. Elle aussi avait besoin d’imploser, de retrouver son équilibre. Monroe lui avait ôté un tel poids de la poitrine qu’elle ne savait plus comment vivre légèrement ; elle était persuadée que le vent la prendrait avec lui, et qu’elle n’aurait pas assez de douleur et de rage pour rester accrochée au sol. La colère l’avait gardée en vie. Désormais qu’elle était en paix, qu’y avait-il pour la retenir ?

Elle aurait presque entendu la voix de sa grand-mère, penchée sur la fenêtre au-dessus d’elle, lui tendant son archet. L’orage n’est pas un dieu, Raphaëla, c’est une musique sur laquelle tu peux composer.

Et en cette nuit d’orage, brumeuse et sombre, froide et tempétueuse, Raphaëla saisit son archet et se raccrocha à l’art, de toutes ses forces, pour se rappeler qu’elle aussi savait tempêter.

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Renarde
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Renarde »

Nuit d’orage – 29 octobre

La pluie s’emballe
Nuit qui se zèbre d’éclats
Murmure du ciel

Zlaw
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Zlaw »

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Modifié en dernier par Zlaw le 06 avr. 2023, 20:39, modifié 1 fois.

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Ewen
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Ewen »

29 octobre – Nuit d’orage
Les soirs d’orage, lorsque la pluie martèle les volets et que le vent siffle des airs glacials, impossible pour nous de fermer l’œil. Le tonnerre gronde de plus en plus fort, et l’on en ressent les vibrations jusque dans nos os. Malgré deux couvertures et des pyjamas chauds, on claque toutes les deux des dents. Alors Agnès et moi on se sert l’une contre l’autre, un doudou sous chaque coude, en espérant que le ciel se calme peu à peu… Ce soir-ci, c’est différent. Papa et maman sont chez des amis et nous ont dit de n’ouvrir la porte à personne. Pourtant, il nous semble bien entendre des coups frappés contre la porte. Peut-être n’est-ce que le vent qui souffle plus fort ? Maintenant c’est contre les volets de notre chambre. Ça ne peut pas être le vent cette fois-ci, il y a bel et bien quelqu’un qui essaye de rentrer chez nous. Il faut qu’on se barricade, mais Agnès me tire par la manche pour que je ne la laisse pas seule au lit. Elle me dit qu’elle entend une grosse voix venir de dehors. Je tends l’oreille, mais n’entends qu’un son sourd et lointain, couvert par le vacarme de la tempête.

— MAIS BON SANG ELLES VONT NOUS OUVRIR OU QUOI ? AGNÈS ! ROSE ! OHÉ !!! ON EST RENTRÉS !

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