Un personnage aux pensées "déplacées"

Avatar du membre
DraikoPinpix
Messages : 1352
Enregistré le : 06 sept. 2019, 17:20
Localisation : Synoradel
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par DraikoPinpix »

J'ai surtout peur des jugements hâtifs, en fait. Mais bon, comme beaucoup l'ont dit, il faut surtout que je revois les comportements de mes autres personnages.

Quant à l'aspect sexuel. Alors, non, je ne parle jamais des poitrines des personnages féminins, ni des formes d'ailleurs. Enfin, mon personnage ne fait aucune remarque sur ça. Il est surtout concentré sur la beauté de manière générale. Il va complimenter la peau, les yeux, les cheveux, par exemple. De manière lyrique. Il va souvent dire aux femmes qu'elles sont jolies. Rien de sexuel, donc. Mais je reste prudente dans la manière d'amener ça.

@Raza En effet, ton exemple est intéressant. Creuser le vocabulaire pourrait édulcorer la chose, même si la signification reste la même. Bien évidemment, je ne veux pas dire que ça sera acceptable quand même ^^

Avatar du membre
Zénodote
Messages : 716
Enregistré le : 09 janv. 2018, 00:25
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par Zénodote »

Je suis mitigée sur la nécessité d'indiquer avec plus ou moins de subtilité ton positionnement moral par rapport à ton personnage :/ D'une part, tu n'es jamais à l'abri de tomber sur des lecteurs qui passeront à côté de ces messages ou au contraire trouveront dans ton texte des significations auxquelles tu n'avais pas pensé. D'autre part, la littérature - a fortiori la littérature pour adulte - n'a pas vocation à moraliser les mœurs, bien qu'elle joue un rôle essentiel dans leurs évolutions.

J'aurais même tendance à penser que ne pas juger ses propres personnages permet de développer leurs psychés avec plus de liberté et de profondeur. Par exemple, dans Les Bienveillantes de Jonathan Littell, le narrateur-bourreau commet des atrocités sans que son système de valeur ne soit remis en cause dans le sous-texte. Idem pour La mort est mon métier de Robert Merle. On peut penser aussi à Meursault dans L'étranger de Camus: pas de jugement, juste du développement de personnage. Dans ces livres, les auteurs ne guident pas les lecteurs, ils leur laissent faire la part des choses.

Développer un personnage chelou sans indiquer sa désapprobation dans le sous-texte ne veut pas dire valider son comportement. C'est à toi de décider si tu as envie de montrer cette désapprobation ou pas, en fonction des émotions que tu souhaites susciter chez tes lecteurs :)

De manière générale, plus ton personnage est nuancé, complexe et... humain, j'ai envie de dire, plus le risque est grand de déplaire.

Avatar du membre
Napalm Dave
Messages : 31
Enregistré le : 09 avr. 2020, 22:39
Localisation : Tours
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par Napalm Dave »

Je suis tout à fait d'accord avec ce qui a été dit par @Zénodote .
Le piège de l'autocensure est bien pire que la démarche de mettre en scène un personnage qui peut faire polémique. En tant que lecteur de comité autrefois et en tant qu'auteur de textes courts j'ai parfois été surpris de l'interprétation négative d'un perso ou d'une scène qui me paraissait anodine.
Le ton du récit donne un indice sur le positionnement (ou non de l'auteur), et pour ma part, je n'ai eu affaire qu'une fois qu'à un texte ouvertement homophobe et assumé, mais la différence se voyait très clairement avec tous les récits que j'avais lu avec de personnages idiots, brutaux et pétris de préjugés mois dont on voyait clairement que l'auteur les utilisait... comme persos de fiction et pas comme émissaires de ses idées politiques.
(au passage, je ne pense pas que tout récit soit forcément politique, il est influencé par son auteur mais les interprétations politiques viennent d’ailleurs).

Au pire tu peux faire un petit avertissement avant le récit comme le fait parfois un de mes auteurs favoris, Brussolo, qui n'hésite pas utiliser l'ultra-violence te la sexualité comme instruments. Par exemple, lorsqu'il écrit un récit du Moyen-âge, il explique bien qu'un perso âgé de 16 ans est un homme ou une femme et qu'à cette époque, l'adolescence telle qu'on la définit aujourd'hui n'existe pas en tant que notion. Ce n'est pas une raison pour verser ouvertement dans le récit pédophile mais nier que les contextes changent et que les jeunes gens ont une sexualité, sous quelque forme qu'elle puisse se manifester, est aberrant.

Avatar du membre
Louis.W
Messages : 85
Enregistré le : 17 juil. 2020, 17:22
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par Louis.W »

Petite contribution je rejoins l'avis de @Zénodote. Je pense que peu importe ce qu'on écrit, on se soumet toujours au jugement des gens, hâtifs ou pas. Le plus important est de ne pas casser un personnage qui fonctionne ou qui est "réaliste". De plus, la surprise est je pense un procédé scénaristique considérable. On peut tellement en jouer, que je trouve dommage, dès le début, de dire : "non ce personnage n'est pas comme ça" ou "ce personnage ne finira pas comme ça". Je trouve que la morale, ou tout message qu'on souhaite passé à plus de poids quand on croit réellement à ce qu'on lit et qu'on ne peut pas s'attendre à ce qui va venir.

C'est subjectif bien sûr, mais à mon avis tu devrais assumer le personnage dans son entièreté et ce que tu comptes en faire dans le récit. Quitte à perdre quelques lecteurs qui seront trop prompts à juger dès les premiers chapitres d'une oeuvre. Aussi, peut-être que tu peux commencer le livre par une autre partie de sa personnalité, ou autre chose dans l'histoire, et l'introduire un peu plus loin quand les gens seront pris dedans.

Avatar du membre
HarleyAWarren
Messages : 156
Enregistré le : 18 janv. 2021, 10:37
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par HarleyAWarren »

Je me permets de déterrer ce topic parce que je suis aussi en plein dedans. Dans l'histoire que j'écris en ce moment, disons que tous les personnages sont... des connards en puissance je crois qu'il y a pas d'autres termes. Littéralement pas un pour rattraper l'autre. Il y en a notamment un (je mets en spoiler pour pas spoiler mais surtout parce que c'est possiblement choquant pour certains)
Spoiler
qui explique qu'il a violé un autre soldat pendant la guerre, avec une telle brutalité que le soldat en question s'est suicidé sur le champ
. C'est un élément de l'histoire qui n'est pas remis en question ou condamné dans le texte, parce que c'est du point de vue du protagoniste, qui est un peu frapadingue (pour être polie). Bref, on est un peu sur le même cas mais aussi sur un touuut autre ordre de magnitude qu'un personnage un peu relou avec les femmes mais finalement pas bien méchant, à un criminel qui a un mort sur la conscience (enfin, plusieurs mais surtout celui-là).

Bref, tout ça pour dire que j'ai trouvé les réponses à ce topic fort intéressantes et je me demandais si, à votre avis, ça peut s'appliquer quel que soit ce qu'on reproche au personnage en question ou s'il y a des limites à ne pas dépasser ? :'D

Avatar du membre
Soah
Modératrice
Messages : 992
Enregistré le : 31 oct. 2018, 14:49
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par Soah »

Coucou @HarleyAWarren je pense que les univers ainsi que les personnages sont de notre responsabilité. Dans un premier jet, je pense qu'il est normal de ne pas se restreindre : il faut que la créativité sorte, apprendre à connaître ses personnages ainsi que le monde qui les entoure.

Néanmoins, toute histoire est porteuse de messages ainsi que de sens. Et surtout, pour moi, il y a une grosse différence entre écrire un essai historique qui se veut être au plus proche de la réalité avec une bibliographie/une recherche académique supportant ce travail et écrire de la fantaisie. Nous sommes les bâtisseurs des mondes que nous écrivons, nous sommes celleux qui avons le pouvoir sur les lois, les règles. Il faut alors se questionner des valeurs que l'on veut véhiculer ainsi que des thématiques que l'on veut pour son oeuvre.

Alors, peut-être que certaines choses choquantes, à la relecture, doivent alors devenir plus subtiles, devenir un jeu de piste avec le lecteur pour lui faire comprendre l'horreur sans lui montrer. Certaines choses peuvent être supprimées car pas en adéquation avec ce que l'on a envie de transmettre. Et surtout, se questionner sur le pourquoi. Est-ce utile ? Est-ce inutile ? Comment faire en sorte que cette cruauté (dans le cas du personnage que tu évoques.) ne soit pas gratuite ?

Parfois ce n'est pas nécessairement nos intentions mais, il faut voir que par nos écrits, certains actes affreux se retrouvent (en quelque sorte) cautionner : as-tu envie que ça soit le cas pour ton récit ?

Avatar du membre
Rachael
Modératrice
Messages : 2913
Enregistré le : 06 janv. 2018, 15:00
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par Rachael »

Soah a écrit : 17 mars 2021, 08:01 Parfois ce n'est pas nécessairement nos intentions mais, il faut voir que par nos écrits, certains actes affreux se retrouvent (en quelque sorte) cautionnés : as-tu envie que ça soit le cas pour ton récit ?
Selon la manière dont ces "actes affreux" sont décrits, cela peut aussi être un moyen de les dénoncer, donc tout dépend vraiment de la manière dont ils sont présentés par l'auteur.

Avatar du membre
Shangaï
Messages : 635
Enregistré le : 08 avr. 2020, 18:33
Localisation : France - Pays de la Loire
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par Shangaï »

@HarleyAWarren je suis moi-même un peu dans cette situation :
Spoiler
Dans mon texte l'un des méchants de l'histoire est métissé (origine d'inspiration égyptienne) et est polygame ce qui choque énormément l'héroïne. J'ai peur que les lecteurs pensent que je fais l'amalgame personne de couleur = méchants. J'ai beau selon moi avoir fait la balance avec d'autres personnages de couleur et même avoir abordé le sujet de la stigmatisation, j'ai peur que le lecteur bloque sur ce passage et ne stop sa lecture...
Après réflexion ainsi qu'avis des Plumes, j'ai pris le partie de me faire confiance et de laisser mon texte tel quel.

En effet, je pense que nous, auteurs, nous devons mesurer la porté de nos écris en faisant véhiculer le message souhaité ! D'ailleurs je ne suis pas certaine qu'il y est des limite à ne pas dépasser mais plutôt des façon d'aborder certains sujets. Si tu estime avoir fait passé ton message sans que la méthode ne vienne te donner des boutons alors il est possible de penser que tout roule. Après l'idéal lorsque l'on a un doute c'est de faire lire à un tiers et de voir sa réaction...

Avatar du membre
HarleyAWarren
Messages : 156
Enregistré le : 18 janv. 2021, 10:37
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par HarleyAWarren »

Soah a écrit : 17 mars 2021, 08:01 Certaines choses peuvent être supprimées car pas en adéquation avec ce que l'on a envie de transmettre. Et surtout, se questionner sur le pourquoi. Est-ce utile ? Est-ce inutile ? Comment faire en sorte que cette cruauté (dans le cas du personnage que tu évoques.) ne soit pas gratuite ?

Parfois ce n'est pas nécessairement nos intentions mais, il faut voir que par nos écrits, certains actes affreux se retrouvent (en quelque sorte) cautionner : as-tu envie que ça soit le cas pour ton récit ?
Je vois ce que tu veux dire et c'est principalement ce qui me pose question dans ce cas-là. D'un côté, il y a tout un contexte historique que je ne veux pas spécialement édulcorer, où les personnages ont des valeurs qui sont aux antipodes des nôtres (par exemple, ça ne leur pose pas de problème qu'un homme de quarante ans fréquente un garçon qui en a quinze mais ça les choque beaucoup qu'ils soient de classes sociales très différentes). En ce qui concerne l'utilité de présenter de telles choses, en pesant le pour et le contre, je pense que ça reste pertinent dans le sens où ce genre d'horreur est une part intégrante à la question que pose le récit (j'aime pas trop parler de message) et qui pourrait être grosso modo résumée par : "Est-ce mieux de s'épanouir dans une monstruosité qui nous satisfait que de s'efforcer d'être une bonne personne qu'on est pas vraiment ?"

Je manie très souvent l'horreur et le sordide dans mes textes, mais je pense que c'est la première fois que c'est de façon aussi peu ouvertement condamnée, dans le sens où le point de vue de l'histoire va dans le sens du monstrueux et que les personnages qui sont raisonnablement choqués par ce qui se passe sont du côté des antagonistes. Après, il arrive des bricoles aux personnages qui sont en "tort" mais d'un autre côté, il n'y a jamais de moment de prise de conscience, ça file toujours vers le bas sans jamais remonter. Et j'attendrai la réaction des lecteurs pour confirmer ou non le sentiment que j'ai qu'un arc plus positif déservirait pas mal le propos. Bref, c'est pas simple x)

Dans un sens, je sais parfaitement où je veux aller, ce que je veux dire et comment je veux le dire mais d'un autre côté, je me demande si, en l'état, ça peut être compris.

EDIT parce que je viens de penser à une bonne analogie à faire : en fait, je voudrais faire un truc un peu à la Sade, où on a des personnages qui se vautrent dans le mal et qui servent de support à une critique de la société, un questionnement moral ou philosophique, le tout de façon détournée. Le truc, c'est que je ne sais pas si un lecteur qui n'a pas ce bagage sadien (tout le monde n'a pas lu Sade et je les comprends à fond haha) va comprendre que ça doit être compris à un degré différent

Avatar du membre
Louis.W
Messages : 85
Enregistré le : 17 juil. 2020, 17:22
Contact :

Re: Un personnage aux pensées "déplacées"

Message par Louis.W »

@HarleyAWarren

La question est compliquée et je pense interroge plus la vision de l'auteur qu'autre chose. Si le récit raconté est ancré dans une certaine époque historique. Si les faits "mauvais" de cette époque sont connus, le lecteur, je pense, acceptera ces derniers sans supposer qu'ils sont le reflet de la moralité de l'auteur.

En terme de portée ou de message, c'est un peu plus subtile. Si les gens ont été happés par le récit, ils essaieront toujours d'en déduire un message, existant ou non. Ils le feront donc avec ce que le texte leur a donné à lire, et concluront quelque chose d'eux-mêmes.

Tu peux peut-être évaluer toi-même les différentes déductions que les lecteurs feront et te poser la question : est-ce que ça me dérange qu'ils déduisent ça du récit ?
Si oui, il faudra du coup rajouter/modifier des éléments à la trame/narration, et si non, tu sauras que tu es à l'aise avec en grande partie, les différentes interprétations, souhaitées ou non, qu'un lecteur peut se faire de ton oeuvre.

Répondre

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré et 4 invités