PAtober - édition Octobre 2022

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itchane
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par itchane »

04 octobre - grenouille
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Ewen
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Ewen »

4 octobre – Grenouille

Alors moi quand j'étais jeune j'étais une grenouille. Si, si, je vous assure, c'est sur mon livret de famille : mon père s'appelle Xavier Ducroa et ma mère Delphine Croazig. Vers mes 12 ans, je rentrais d'une petite balade en forêt solo, et alors que je longeais une route de campagne tout à fait banale, une toute petite fille humaine vient vers moi (« Guenouille, guenouille ! »). Et alors elle m'attrape, comme ça, avant que j'ai pu faire un seul bond de plus. Puis elle retourne en braillant dans la cour d'une ferme, bordant la route, probablement celle de ses parents. La maison en soi ne devait pas être bien grande, mais du point de vue d'une grenouille, c'était un palais royal. Et devinez quoi ? Même pas le temps de recoiffer mes pustules que cette jeune princesse de boue et de bottes m'embrasse ! Là tout devient noir. Aucun souvenir. À mon réveil, la petite était à l'autre bout de la cour dans les jupons de sa mère, et le père me donnait des coups dans les côtes avec le manche d'un râteau : « Déguerpis de là le mioche ! Et trouves-toi des fringues nom de… de… ». De Dieu de merde. C'est ça qu'il avait dit à la fin je me souviens maintenant. Bref, je vous passe les années qui ont suivi, si vous avez lu Tom Sawyer vous vous en ferez une idée vague. Mais tout ça c'était il y a plus de 10 ans ! Ce qui compte à présent, c'est ce qu'il se passe entre vous et moi : j'ai besoin d'un travail, n'importe quoi qui me permette de manger autre chose que des mouches ou des pâtes au beurre. Et puis si ça peut mettre en valeur mes compétences, ça serait un plus : je sais sauter relativement haut, toucher mon nez avec ma langue, et gonfler la gorge comme ça, regardez. Ah bah vous êtes la troisième personne qui me reçoit qui tombe à la renverse à cette étape de l'histoire, c'est ma bave qui rend le sol glissant ?

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Isapass
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Message par Isapass »

04 octobre – Grenouille

Voilà près d’une demi-heure que nous arpentons le dédale des tranchées. À mesure que nous nous rapprochons des premières lignes, les tirs d’artillerie deviennent plus réels. La vibration des obus qui éclatent se propage jusqu’à vos pieds, remonte et vous brasse les entrailles comme une main glacée.
– Ils nous envoient du gros, crie le capitaine par-dessus son épaule. Ça fait huit heures que c’est comme ça.
– Je ne comprends toujours pas ce que je fais là, Capitaine.
Il se tourne juste assez pour que je voie son sourire goguenard.
– Il paraît que vous commandez un bataillon un peu… particulier, non ?
J’attends la suite sans confirmer.
– Eh ben, j’ai un candidat, pour vous. Lui, là-bas. Il s’appelle Baptistin Garrigue, mais on lui dit Grenouille. Tenez-vous bien à votre casque et regardez.
Le garçon est assis sur le coffrage, dos à l’ennemi, avec un camarade. J’ai un choc lorsqu’il se tourne vers moi. En principe, il ne peut pas avoir moins de seize ans, pourtant il en paraît douze. Je vois tout de suite d’où lui vient son surnom : il a une bouche très large, sans lèvres. Une bouche de batracien. Pour couronner le tout, ses yeux sont un peu globuleux.
Je suis en train de me demander si leurs têtes ne sont pas visibles de la tranchée d’en face, lorsqu’un tir de fusil retentit. Je m’accroupis précipitamment. Le capitaine m’imite, mais d’une traction sur ma manche, il m’incite à ne pas perdre Grenouille des yeux. Un second tir éclate. Le jeune soldat tourne la tête. Un long serpentin rose jaillit entre ses lèvres minces, se déroule vers le casque de son ami, puis disparait.
– Hop-là, merci ! dit l’autre en riant.
Grenouille se penche au-dessus de sa main tendue et y crache quelque chose. Une balle.

Feydra
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Feydra »

4 octobre - Grenouille Blanche Neige s’approcha de l’étang, songeuse. Il faisait beau mais l’air était froid. Des nuages menaçaient à l’horizon. Elle serra davantage autour de son cou l’écharpe que lui avait offert sa belle-mère . Un coup d’œil derrière elle: sa servante était affairée à compter fleurette au jeune berger. Les moutons qu’il était censés garder piétinaient un champ de courges, mais il n’avait pas l’air de s’en soucier. Bien ! Elle avait encore un peu de temps. Au loin sur le chemin, elle aperçut un chasseur armé d’un arc, mais elle n’y fit pas attention. Ce qui l’intéressait, c’étaient les chanteuses à la peau verte qui se préparaient à entonner leur chansonnette. Dans les contes, les princes étaient métamorphosés en crapauds. Elle était persuadée que les Princesses, quant à elle, étaient transformées en grenouille. Et elle, elle cherchait une princesse avec laquelle jouer. Mais elle n’arrivait pas à décider laquelle elle allait embrasser. Il ne fallait pas qu’elle se trompe : elle ne voulait pas embrasser des grenouilles pour rien. L’une d’elle, assise sur un nénuphar, avait la peau d'un beau rose, de grands yeux bleus et une jolie corne torsadée sur le crâne. Elle semblait regarder les autres avec dédain. Blanche Neige eut un grand sourire de triomphe. C’était surement elle ! Mais alors qu’elle tendait la main pour attraper l’animal qui ne se doutait de rien, sa servante l’attrapa par la main et l’entraina vers le château.

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Sabi
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Sabi »

4 Octobre 2022 - Grenouille
Un produit révolutionnaire
Je suis un vendeur de grenouilles psy. Vous ne savez pas ce que c’est ? Attendez… Vous êtes en train de me dire que toute votre vie, jusqu’à présent, vous ne saviez pas que cette petite merveille existait ?
Comment avez-vous fait votre compte, mon bon seigneur ! Laissez-moi vous expliquer. Commençons par le commencement : son nom. Grenouille psy est le diminutif de Grenade à Douilles Psychotropes. Hein ? Quoi ? Non, non. Rien à voir avec les batraciens. C’est juste un code pour que les flics et le gouvernement nous laissent tranquilles… Bon, vous allez vous taire ? Au bout d’un moment, c’est moi qui parle, non ? Bien.
Je disais donc : grenade à douilles psychotropes, eh oui mon bon monsieur. Est-ce une arme ? À cela, je répondrai par oui et non. Oui, car avec ça, vous pouvez neutraliser pendant dix heures et très facilement le gêneur qui marche sur vos plates-bandes. Non, car ce n’est qu’un fruit qui pousse en Amazonie. Tout à fait madame, un fruit !
Le grenadier psychotrope d’Amazonie est utilisé par les chamans indigènes du Brésil pour entrer en transe. Ce fruit contient ce qu’on appelle des douilles, un terme de biologie à ce qu’il paraît, contenant une drogue que les scientifiques ont encore le plus grand mal à identifier.
On raconte qu’avec ça, vous pouvez voir les morts, le passé, le futur, et vous-mêmes, aussi.
Les douilles se mélangent à n’importe quel produit, sans perdre ses effets ! Imaginez un café qui fait planer le chef du bureau qui vous emmerde depuis une semaine pour avoir les résultats de l’étude marketing de Choc À Pic. Il était loin de se douter que le Choc, c’est lui qui allait se le prendre, ce connard, hein ? Toute situation est envisageable !
Alors ?... Mais oui, on peut faire un emballage-cadeau !

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Gabhany
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Gabhany »

4 - Grenouille

Le grenier sentait bon la poussière et l’antique. C’était le dernier jour pour vider la maison de mon grand-père. Je l’avais peu connu, mais il m’avait légué, dieu sait pourquoi, tout ce qu’il possédait. Ce matin, je m’étais rendu compte que j’avais omis de vérifier le grenier.
Heureusement, il n’y avait pas grand-chose. Beaucoup de toiles d'araignée, quelques cartons défraîchis dans un coin, mais des rangées d’étagères sur chaque mur. Croulant sous des dizaines d’effigies de grenouilles de toutes sortes. Des vertes, des jaunes, des petites, aux joues gonflées ou à la langue sortie. J’en avais sursauté quand j’avais passé la tête par la trappe.
Je caressai d’un doigt toutes les petites têtes lisses qui passaient à ma portée. Mon grand-père était un drôle de numéro, tout de même.
Je me tournai vers les cartons en tentant d’ignorer les douzaines d’yeux morts qui semblaient me suivre. Tous contenaient des albums photos. De magnifiques photos, d’ailleurs. De mon grand-père avec une jolie femme qui m’était inconnue. Comme ils avaient l’air de s’aimer !
La femme était fascinante Pas vraiment belle, mais elle dégageait quelque chose, même à travers le papier photo ancien et la mauvaise définition.Je m’attardai longtemps sur son visage. Les années passées n’avaient rien enlevé à l’intensité de son regard vert.
Sous chaque photo était inscrit « Grenouille et moi ». Tiens, drôle de coïncidence, il m'appelait toujours par ce surnom un peu étrange.
Alors que je tournais la dernière page de l’album, la lumière s’éteignit.
Ce fut seulement à ce moment que la question me traversa : D’où venaient donc ces iris si verts, alors qu’absolument toutes les images étaient en noir et blanc ?
Autour de moi, tous les yeux précédemment morts et parfaitement inertes se mirent à clignoter.

Zlaw
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Zlaw »

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Modifié en dernier par Zlaw le 06 avr. 2023, 20:30, modifié 1 fois.

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Nascana
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Nascana »

Jour 4 grenouille

– Il y a vraiment des gens qui achète ce genre de truc ?
Ma question est plus pour la forme qu’autre chose.
– Si c’est dans le magasin, c’est que ça intéresse quelqu’un, me souffle Cef.
Je ne peux que lui donner raison, mais si j’ai du mal à imaginer la personne qui s’offrirait une statue de chien haute de plus de deux mètres, qui ressemble à un agglomérat de ballons, en teinte rose et doré. N’oublions pas le plus important, un prix qui avoisine les dix mille dollars. Parce qu’en plus d’être moche, c’est cher.
Du coup, ma curiosité est piquée. Je pousse la porte et entre dans la boutique.
– Qu’est-ce que tu fais ?
Mon compagnon n’a pas le temps de me retenir que je suis déjà loin. Je l’entends pousser un soupir. Avec un sourire, je l’imagine râler.
Avec lenteur, je flâne dans les rayons. Mon regard se pose sur chaque objet. Plus j’en vois plus je reste perplexe. Je tente de comprendre comment on peut réussir à marier décoration soignée et l’art vendu à prix d’or dans ce magasin.
Après avoir fait le tour de l’endroit, je ressors sans rien.
– C’est bon ? Tu t’es bien amusée ?
Je prends une moue innocente. Il n’est pas dupe.
– Je me documentais. C’est pour ma culture générale.
– Ta culture générale… Qu’est-ce qu’il faut pas entendre…
Pour le charrier, je reprends :
– J’ai hésité à te ramener un petit souvenir. Un porte-clef avec un sapin qui ressemble à jouer pour enfant de moins de trois ans. Ou alors mieux, un vase en forme de grenouille où tu peux glisser des fleurs dans sa bouche.
– Tu m’envoies du rêve !
Je viens me coller à lui.
– Elle était mignonne la petite grenouille avec ses grands yeux…
– Tu es batracophiles ? Je n’étais pas au courant.
– Je suis Cefophile !

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Ewen
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Ewen »

5 octobre – Feuilles mortes
J'ai découvert Miles Davis avec sa version du standard de jazz Autumn Leaves, que lui et Cannonball Adderley ont immortalisé en 1958 sur l'album Somethin' Else. C'est aussi le premier morceau de jazz que j'ai joué à la basse, puis oublié, puis ré-appris, puis improvisé lors de mes premières jams en compagnie de musiciens plus aguerris. Basé sur un poème de Jacques Prévert adapté en anglais, accompagné par une musique de Joseph Kosma, c'est probablement l'un des morceaux les plus universellement connus, joués, et repris autant par de vrais jazzeux que par des musiciens plus amateurs. L'histoire d'amour achevée qu'elle conte est comme toujours universelle, ainsi que cet amour des feuilles qui tombent à la même heure chaque année. Je ne peux que conseiller l'écoute d'une des premières versions françaises, celle interprétée par Yves Montand (Les Feuilles mortes, la version de 3 minutes 6 précisément, les autres me touchent moins). C'est une chanson qu'il faut selon moi avoir écouté au moins une fois dans sa vie ! C'est une chanson qui nous ressemble, comme elle le dit si bien.

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Nascana
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Re: PAtober - édition Octobre 2022

Message par Nascana »

Jour 5 feuilles mortes

– Tu es prête ?
Pour le moment, c’est encore simple. Je suis blottie dans une robe de chambre, moelleuse et chaude. La suite s’annonce moins drôle.
D’un coup d’œil, je scrute Nick qui observe tout ce qui l’entoure comme s’il s’agissait d’un ennemi potentiel.
– J’adore me rouler dans les feuilles mortes quand arrive l’automne.
Sa main se pose sur mon épaule pour la presser avec douceur. Est-ce sa façon de me rassurer ?
– Tu vas avoir un partenaire, déclare-t-il en me désignant une citrouille évidée du doigt.
– Oui, c’est sur le thème d’Halloween. C’est pour ça que j’ai un body avec une queue de chat. Ainsi que le serre-tête à oreilles.
D’un geste, je défais le nœud qui retient la robe de chambre pour lui montrer ma tenue. Il me fixe pendant l’espace de quelques secondes, avant de refermer lui-même les pans du vêtement.
– Tout le monde pourrait voir.
– Quand ça sera sur le calendrier, ça sera le cas.
Je le plante là et vais m’installer sur l’herbe fraiche. Sur le ventre, je tente de faire abstraction du froid qui remonte et transperce la fine couche de voilure. La citrouille sculptée me rejoint. Quelqu’un s’amuse à m’enterrer sous les feuilles morts humides. Un frisson me prend. Pourtant, je me force à sourire. Je suis une professionnelle.
– On va tenter de faire comme si tu étais un chat qui jaillissait des feuilles mortes pour sauter sur la citrouille, m’informe le photographe.
J’acquiesce. Ce soir, ça sera bain chaud pour me remettre de mes émotions. Près de l’arbre, Nick me fixe. La chaleur que je perçois dans son regard me fait oublier l’inconfort de ma situation.

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