L'écriture inclusive

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Sissi84
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L'écriture inclusive

Message par Sissi84 »

Bonjour, c’est mon premier topic et je suis un peu émue. J’espère être au bon endroit et comme je n’ai rien trouvé en tapant dans la recherche le terme « inclusive », je me lance.

J’ai vu dans beaucoup de discussions que vous utilisiez des mots comme « lecteurice » ou certains avec un point médian, « auteur. e » par exemple.
Je serai curieuse de savoir qui ici est partisan. e :hug: de l’écriture inclusive.
Dans un échange épistolaire, ça va, c’est même pratique. Mais dans le langage de tous les jours, dans les manuels scolaires et peut-être dans les romans qui sait ? Cela vous fait-il réagir ou pas ?

Seriez-vous plutôt d’accord avec la linguiste Stéphanie Pahud, qui estime que l’écriture inclusive a le mérite de frayer des voies d’émancipation, qu’elle dérangerait « l’ordre établi », ce qui expliquerait l’hostilité des milieux conservateurs ?
Ou à l’inverse, êtes-vous plus proche de la chroniqueuse Marie-Hélène Miauton, qui pense que la lecture perdrait l’attrait qu’elle a encore aujourd’hui dans la population et que cela accroîtrait les difficultés d’élèves déjà à la peine ?

Je vous demande ça, car j’ai moi-même du mal à prendre parti. Ça ressemble plus à une bataille idéologique qu’à une refonte de la grammaire.
Si le masculin l’emporte sur le féminin est-ce plus simple ou est-ce discriminatoire ? J’aimerais avoir votre avis.

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Elore
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Re: L'écriture inclusive

Message par Elore »

Hello [mention]Sissi84[/mention] ! Avec ces réflexions, tu n'as pas peur de lancer le débat sur un sujet brûlant. J'espère qu'il donnera lieu à des idées intéressantes <3

Pour moi, l'écriture inclusive a le mérite de questionner l'influence de la langue sur la pensée et la société. C'est une bonne chose que l'idée fasse couler de l'encre et nous force à questionner de vieux biais.

Personnellement, je suis enseignante et j'utilise l'écriture inclusive avec mes élèves d'école primaire. C'est vrai qu'iels ont été un peu perturbé'es au début mais iels s'y sont vite habitué'es. C'est une écriture qui permet de montrer différentes formes des adjectifs, par exemple, et je la trouve très utile pour réviser cette notion. :hug:

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Vava-Omete
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Re: L'écriture inclusive

Message par Vava-Omete »

Oh le beau sujet à débat que voilà !

J'en profite tant que y'a pas encore trop de réponse =D
Personnellement je trouve que... l'écriture inclusive genre auteur.e ou tou.te.s c'est... de la flemme.
°s'abrite des coups de fusil°

Je m'explique :
A mes yeux la langue française a une caractéristique qui fait d'elle un jouet merveilleux : un vocabulaire ultra riche et en même temps parfois très peu précis ou fortement connoté. Ce qui nous amène à deux trucs géniaux : la périphrase et la nuance. C'est une langue qui permet le jeu sur les mots, mais oblige aussi à réfléchir à ce qu'on va dire et comment le dire, histoire de faire passer son message au mieux et de la façon la plus compréhensible possible.
En exemple, je citerai le cas d'une déclaration d'amour : lorsque la personne vous dit "je t'aime" mais que ça n'est pas réciproque, répondre "je ne t'aime pas" peut être perçu comme très violent, puisqu'en connotation il y a le jugement de valeur équivalent à "je te déteste" (je n'aime pas quelqu'un) alors que répondre "je ne partage pas tes sentiments" est plus clair, bien que plus long à exprimer.
Pour pour l'écriture inclusive c'est un peu pareil...
Pourquoi dire "lecteur.ises" quand on peut dire "lectorat" ? Pourquoi écrire tou.te.s quand on peut écrire toutes et tous ? Auteur.e.s quand on peut écrire auteurs et autrices ? Pourquoi cesser de s'enrichir en vocabulaire ou en recherche de tournure de phrase pour inclure tout le monde dans un groupe ou dans une catégorie alors qu'en tournant bien ses phrases, en faisant un petit effort langagier, on peut trouver les mots justes pour exprimer sa penser et inclure tout le monde ?

Travaillant dans le commerce en contact direct avec la clientèle et en plus dans la vente de livre, c'est quelque chose sur laquelle on travaille beaucoup pour éviter les conseils orientés ou de "vexer les gens". Au lieu de demander machinalement "Qu'est ce qu'il aime ?" (masculin faisant office de neutre) on demande "qu'est ce qu'aime la personne ?" par exemple, ou "est-ce que vous connaissez les goûts de l'enfant à qui vous voulez faire un cadeau ?" etc. on a aussi bannit les termes "girly" et "garçon manqué" pour les remplacer par "aimant la coquetterie" ou "aimant l'aventure" histoire de rester le plus neutre possible dans tout un tas de cas.
Ca demande une gymnastique d'esprit que je trouve très agréable personnellement.

Par contre, lorsqu'une périphrase est impossible, j'avoue utiliser les termes neutre iel (il/elle), an (un/une), lo (la/le) et cieux (ceux/celles) à l'écris et a l'oral, de même que le . d'inclusion (genre dans la phrase de [mention]Elore[/mention] "début mais iels s'y sont vite habitué'es" c'est parfaitement logique et utile de mettre l'inclusion, même s'il aurait été possible d'écrire "mais l'habitude a vite été prise" ou "iels en ont rapidement acquis l'habitude"). Mais globalement, je travaille vraiment de façon à avoir le moins possible recours à cette forme de typographie qui me coupe totalement de ma lecture (et que je trouve très moche xD).

Personnellement, je trouve plus intéressant/pertinent, le développement de pronom, de noms et de termes neutres que le développement forcené de l'inclusion qui, certes, facilite les choses, mais qui dans beaucoup de cas appauvrit pour moi ce qui pourrait être écrit.
Modifié en dernier par Vava-Omete le 15 août 2020, 00:33, modifié 1 fois.

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Sissi84
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Re: L'écriture inclusive

Message par Sissi84 »

Merci [mention]Elore[/mention] pour ton partage.
Les enfants, surtout à cet âge-là, ont encore un cerveau très malléable, élastique et surtout, ils sont curieux et ont soif d’apprendre.
Mais pour quelqu’un de ma génération qui perd — n’ayons pas peur de le dire — ces facultés avec le temps, c’est plus difficile, voire laborieux.
Je me souviens avoir écrit une nouvelle qui s’intitulait « Kestudi », l’histoire d’un conflit parents/enfants, dont les protagonistes finissaient par ne plus se comprendre, les adultes parlant français, les enfants ne s’exprimant qu’en langage SMS.
Ce que je crains c’est qu’un fossé se creuse pendant une génération ou deux. Le langage SMS est interdit à l’école, mais si l’écriture inclusive s’apprend en primaire, il se peut que les échanges de courrier entre parents et enfants deviennent compliqués.
C’est vrai, on pourrait s’y mettre aussi, mais je préfère me prendre la tête, comme le propose [mention]Vava-Omete[/mention] pour trouver des formulations qui me permettent de différencier les genres.
Par curiosité, est-ce de ta propre initiative ou est-ce déjà au programme ?
En tout cas, merci pour ta réponse, je pense que ce débat va être intéressant.

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Sissi84
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Re: L'écriture inclusive

Message par Sissi84 »

Merci [mention]Vava-Omete[/mention] pour ce beau plaidoyer pour défendre notre langue et les mots.
D'autant qu'avec les trois cents millions de francophones à travers les cinq continents, il faudrait convaincre les quatre-vingts États d'adopter l'écriture inclusive et le langage « dégenré » … ça risque d'être un sacré foutoir !
Aujourd'hui, seules la France et la Suisse ont commencé l'expérience.
Quand les soixante-dix-huit autres l'auront adopté, je serai sûrement réduite en cendre au fond de l'océan atlantique. Mais qu'en sera-t-il pour nos enfants. Changer de monnaie c'est déjà une épreuve, mais modifier une langue en profondeur qui cède à la simplification moche, ça me rend triste.

Mais finalement, la France est déjà passée par là avec la modification de la règle de proximité.
Admirons ensemble la belle prose de Louis-Nicolas Bescherelle dans l’édition de 1850 de sa Grammaire nationale :

« Dans ces exemples, souvent cités, le féminin est à sa place ; l’ironie explique tout. Le but des auteurs est d’exprimer un ridicule ; or, la masculinité annonce toujours une idée grande et noble ; elle eût été déplacée ici sous la plume satirique de nos grands écrivains. Le féminin est donc venu là, parce que le masculin n’y pouvait être. Les exemples d’expressions féminines, dans l’ironie, sont très nombreux. En effet, veut-on peindre d’un seul trait un guerrier qui manque de courage, on l’appelle ironiquement une femme ! Celte ironie est de la dernière injustice, il est vrai, mais enfin elle explique les peuples qui s’en servent et les langues qui l’emploient. En France, l’ironie est féminine, parce que le masculin est toujours noble dans son emploi. Du reste, l’ancienne grammaire avait admis cette vérité, en lui donnant cette forme si connue : Le masculin est plus noble que le féminin. »

On comprend mieux les défenseurs de l'écriture inclusive :laughing:
Modifié en dernier par Sissi84 le 15 août 2020, 00:59, modifié 2 fois.

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Vava-Omete
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Re: L'écriture inclusive

Message par Vava-Omete »

Mais de rien [mention]Sissi84[/mention] !
Je ne suis cependant pas sûre que la communication deviendra impossible/difficile entre génération proches comme les parents-enfants, même si clairement, on utilise pas le même vocabulaire ni le même sens aux mots parfois. Les gens feront toujours l'effort de s'expliciter histoire d'êtres compris.

Attention aux doubles post cependant, qui est strictement interdit sur le forum ;) si tu te rend compte que tu as posté ta réponse trop vite et que tu souhaites ajouter quelque chose, il te suffit de l'éditer grâce au petit symbole du crayon, à côté du point d'exclamation en haut à droite de ton poste.

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Sissi84
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Re: L'écriture inclusive

Message par Sissi84 »

Vava-Omete a écrit : 15 août 2020, 00:53 Attention aux doubles post cependant, qui est strictement interdit sur le forum ;) si tu te rend compte que tu as posté ta réponse trop vite et que tu souhaites ajouter quelque chose, il te suffit de l'éditer grâce au petit symbole du crayon, à côté du point d'exclamation en haut à droite de ton poste.
Je ne savais pas. Je voulais répondre individuellement à chacun. Je te remercie pour l'info

À propos de droit, j'ai trouvé un article très intéressant sur la toile. Est-ce qu'on a le droit de mettre un lien ?

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Fannie
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Re: L'écriture inclusive

Message par Fannie »

Autant je suis en faveur des féminisations (tant qu'elles respectent la morphologie du français), autant je suis opposée à l'écriture inclusive, ainsi qu'à l'emploi des doubles formes en général. (Parfois je me sens obligée d'employer ces dernières et ça m'ennuie.)
L'écriture inclusive ralentit la lecture, beaucoup de ses formes ne sont pas lisibles à haute voix, et les doublons qu'elle introduit entraînent souvent des problèmes grammaticaux dans la suite des phrases. D'autre part, cette écriture n'est même pas inclusive, dans le sens où elle n'exprime que le féminin et le masculin, pas le neutre, ni une quelconque forme non genrée. Si je lis ou si j'entends "les Suisses" ou "les citoyens", je me sens incluse ; je n'ai pas besoin qu'on précise "les Suisses et les Suissesses" ou "les citoyennes et les citoyens". Ça alourdit et ça prolonge inutilement le discours. Pire, cette habitude a un effet pervers : elle incite les jeunes filles à ne pas se sentir incluses quand la personne qui s'exprime omet les doublons.
Ces manières de parler et d'écrire qu'on veut nous imposer sont des entraves à la liberté de la langue, et finalement à la liberté d'expression ; il y a d'abord eu le langage politiquement correct, puis le langage dit "épicène", maintenant l'écriture inclusive. Ça commence à faire beaucoup de contraintes pour obtenir une langue moins claire et mois efficace, sans que ça fasse progresser la société.
D'ailleurs le genre grammatical et le genre des gens sont deux choses différentes. Un homme est une personne comme une femme est un être humain et je ne vois pas en quoi ça devrait être un problème. Et ce n'est pas en obligeant les gens à s'exprimer d'une certaine manière qu'on les rend plus respectueux des femmes ou des minorités.
La langue est censée influencer les mentalités ; il y a des langues qui n'ont pas de genres grammaticaux, comme le hongrois, qui ne compte qu'un pronom (avec deux formes : singulier et pluriel). La langue hongroise serait idéale pour être inclusive, en tout cas du point de vue grammatical. Pour autant, les régions où on parle le hongrois sont-elles plus féministes et plus favorables à la communauté LGBTQI+ que la francophonie ? Certainement pas. Donc ce n'est pas la grammaire française qui est à l'origine des préjugés sexistes des francophones, même si à un moment de son histoire, elle a été modelée par des phallocrates.
Vouloir faire évoluer la société en modifiant la langue revient, à mon sens, à mettre la charrue devant les bœufs.

Ysaé
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Re: L'écriture inclusive

Message par Ysaé »

J'ai lu toutes la discussion, c'est très intéressant!
Je n'utilise pas l'écriture inclusive car à la lecture, cela me gêne beaucoup. Le fait de mettre un point avant une terminaison par exemple, bloque l'œil comme pour une fin de phrase, et certains pronoms fabriqués sont carrément incompréhensibles. Je n'ai pas lu d'histoire en écriture inclusive sur PA pour l'instant mais malheureusement j'abandonnerai sûrement ma lecture si c'était le cas, parce que cela me gâcherait mon plaisir.
Je ne suis pas contre à priori, mais pour l'instant je n'ai pas vu d'écriture inclusive (il semble d'ailleurs y avoir plusieurs normes, difficile de s'y retrouver) qui soit fluide à lire.
Par ailleurs il existe des moyens pour inclure, évoqués un peu plus haut, comme écrire "auteurs et autrices" tout simplement, ou mettre les accords de participe passé entre parenthèse lorsque c'est nécessaire.

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Flammy
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Re: L'écriture inclusive

Message par Flammy »

[mention]Sissi84[/mention] Je confirme que les doubles posts sont interdits. Attention à bien lire les règles, c'est marqué dedans ;)

[mention]Vava-Omete[/mention] Tu dis que tu préfères utiliser par exemple "le lectorat" plutôt que lecteurice. Tu sais que ce genre de formulation, où on utilise un mot général sans genre marqué, c'est l'une des formes de l'écriture inclusive ? ;) Donc tu fais de l'écriture inclusive tous les jours dans ton travail :smirk:

Quand on parle écriture inclusive, on pense souvent que en forme avec un point médian. Sauf qu'en vrai, il en existe pas mal de forme. Justement parce que c'est niveau, ya pas de vraies règles figées et donc pas mal de choses sont testées à droite à gauche, parfois plus ou moins jolies. Féminiser des noms de métiers qui ont pas forcément de féminin, c'est aussi de l'écriture inclusive par exemple.

L'écriture inclusive, c'est juste, par définition :
L’écriture dite inclusive est une forme d’écriture neutre, non sexiste qui a pour objectif premier d’établir la parité femme/homme dans la langue française.
Donc tout ce qui permet de supprimer le sexisme dans la langue, les mots "généraux" comme lectorat, évoquer une autrice, dire mesdames et messiers au début d'un discours... Tout ça, c'est de l'écriture inclusive, et je pense qu'on en a tous fait à plus ou moins grande échelle.

Après, certaines formes peuvent perturber plus ou moins, je pense notamment à celle avec le point médian qui est souvent celle qu'on présente comme la plus illisible. Personnellement, au début j'avais énormément de mal, et puis maintenant, quand j'en lis, je m'en rend pas forcément compte. Typiquement, le règlement de FPA est en écriture inclusive avec point médian, j'avais même pas réalisé ='D Donc je pense que, sauf souci genre dyslexie (qui est un vrai problème), ça tient plus de l'habitude que d'autre chose.

Pour créer un fossé entre les générations, je pense pas que ça soit l'écriture inclusive qui sera responsable de ça. Je pense qu'il y aura beaucoup plus d'incompréhension avec les nouvelles technologie, habitude ou autre avec un point ou ce genre de trucs qui, même si on peut les trouver moches/pas joli, reste quand même facilement compréhensible. Typiquement, ma grand mère qui comprend toujours pas le principe d'internet a compris très vite le "iel". Donc si des incompréhensions il doit y avoir, ya pour moi beaucoup d'autres sujets qui poseraient problème avant l'écriture inclusive.

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